sábado, 26 de junho de 2010

OS GRANDES HOMENS

 Jacques Julliard

Comme il est loin, de Gaulle !

J'ignore quelle montre avait le Général mais je sais qu'il aimait Chateaubriand, Péguy, Malraux...


Je me demande bien au nom de quoi les Français osent célébrer avec des trémolos l'homme du 18 juin 1940. Comme tous les héros nationaux, Vercingétorix, Jeanne d'Arc, Napoléon ou Clemenceau, Charles de Gaulle incarne deux choses totalement étrangères à la mentalité contemporaine : une conception héroïque de l'existence ; le primat de la gloire de la patrie et de son indépendance sur le bonheur des citoyens. Or on ne trouve rien de semblable aujourd'hui, ni dans le peuple, ni dans les élites. Le peuple, y compris la jeunesse des écoles, ne songe qu'à défendre ses retraites, les élites ne pensent qu'à se remplir les poches.
 

Si l'on veut une image fidèle de la France d'aujourd'hui, il faut plutôt aller la chercher du côté de cette équipe de football que nous avons envoyée en Afrique du Sud. Emmenés par un entraîneur caractériel et imprévisible, les joueurs français, qu'ils soient blancs, blacks ou beurs, n'ont pour le moment affiché que leur suffisance, leur appât du gain et leur nullité. Plus virils dans les bordels de luxe que sur les terrains. Quel que soit leur avenir dans cette compétition, ils donnent de la France une image lamentable, mais hélas exacte.
 

A la tête de l'Etat, le tableau n'est pas plus exaltant. Nicolas Sarkozy a proclamé dès son élection son amour de l'argent, quand de Gaulle ne dissimulait pas son mépris de la Bourse (« La politique de France ne se fait pas à la corbeille ! »). Le premier aime à s'entourer de patrons quand le second soulignait qu'il n'en avait rencontré aucun à Londres. Du Général, je ne connais pas la marque de la montre, mais je me souviens qu'il aimait Chateaubriand, Péguy, Malraux et probablement « la Princesse de Clèves ».
 

Il est vrai qu'il en a toujours été ainsi. Les élites ont toujours penché du côté des Bourguignons plutôt que des Armagnacs. En 1871, en 1940, elles étaient pour cesser le combat, au nom du réalisme et du moindre mal. A l'inverse, les héros sont presque toujours des aventuriers et, pour les peuples comme pour les femmes, la gloire n'est jamais, selon le mot de Madame de Staël, que le deuil éclatant du bonheur. On a donc le droit de choisir Créon contre Antigone, Turelure contre Coûfontaine, mais alors il faut avoir la pudeur de ne pas bercer ses retraites des accents de la charge héroïque.
 

Je sais pourquoi les vieux républicains n'ont jamais aimé de Gaulle. Parce qu'il représentait un danger pour la liberté ? Allons donc ! A deux reprises, il a tiré la République du gouffre. Mais bien parce que sa vision héroïque de l'existence n'avait guère sa place dans le train-train du système représentatif. Le grand homme est incompatible avec le règne des notables ; il ne s'introduit dans l'Histoire moderne que par effraction, dans les intermittences de la démocratie, comme en juin-juillet 1940.
 

Autrement dit, il y a un ordinaire de cette démocratie, toujours guetté par le pétainisme, et un extraordinaire de cette même démocratie, qui peut s'appeler le gaullisme et qui est une éthique du refus. La loi du nombre, qui est le régime normal, ne saurait nous dispenser d'une morale personnelle de l'action.
 

Non que le grand homme soit incapable de comprendre le peuple. Loin d'avoir mystifié celui-ci grâce à son charisme, de Gaulle a le plus souvent su traduire mieux que le système représentatif ses aspirations. Contre leurs notables, les Français étaient acquis, avant même que de Gaulle ne se déclare, à l'élection du président au suffrage universel, à la sortie de l'organisation militaire de l'Otan, à la fabrication d'une bombe atomique et à l'Europe des nations (1).

Le grand homme ne saurait devenir un rouage normal des institutions. Il est celui qui, dans l'épreuve, détourne ses concitoyens de la tentation de la résignation, voire du désespoir. La démocratie est le règne du plus grand nombre, au service du plus grand nombre, et il est bon qu'il en soit ainsi. Mais quand le malheur rôde, le monde ne peut être sauvé que par quelques-uns.

(1) Je l'ai démontré à partir des sondages d'époque dans un essai : «Que sont les grands hommes devenus ?», Saint-Simon, 2004, à reparaître à l'automne chez Perrin.

1 comentário:

Anónimo disse...

Eis o bonapartismo francês no seu melhor,ou seja com a qualidade estilística e argumentativa do Julliard. Estou de acordo com a opinião de que os momentos políticos de excepcional gravidade podem exigir a presença de homens excepcionais.Mas podemos encontrá-los dentro do regime democrático,como é o caso de Churchill,talvez o maior estadista do século XX,Roosevelt,etc. O caso de De Gaulle é diferente,pois como nota tambem o Julliard,ele surge em dois momentos de colapso das instituições. E afinal acaba por salvar e reconstituir a democracia. Ele menosprezava a maioria dos homens politicos do seu tempo,mas o regime é outra coisa, e a VªRepública,sua herança, tem funcionado com sucesso até hoje,mais próxima do presidencialismo americano do que do parlamentarismo puro da IVª,certamente e ainda bem.