"Le sort infligé à DSK par la justice américaine" me fait penser "que le peuple américain et nous n’appartenons pas à la même civilisation". Par Jean Daniel
Dominique Strauss-Kahn (AFP)
Des impératifs rédactionnels m’obligent chaque semaine à rédiger mon éditorial pour le lundi soir à 17h00. Plus rien n’est possible après. Jusqu’à maintenant, il n’y avait pas eu de catastrophes. Cette fois-ci, c’est différent. J’ai passé la nuit à pester contre la technique. Donc, aujourd’hui, ceci.
Le sort infligé à DSK par la justice américaine, par la conception que nous avons de la transparence, par le règne de l’image, bref par les lois nouvelles de notre métier, ce sort est tout simplement épouvantable.
Nous avons assisté à l’organisation médiatique d’une mise à mort, comme dans une corrida où l’on sait que le taureau va mourir, sauf qu’il n’y avait cette fois aucun torero qui prenne des risques. Strauss-Kahn donnait bien l’impression d’un taureau blessé qui met un genou à terre et attend l’estocade.
Il avait l’air de dire : "Finissons-en puisque vous voulez ma mort." Pourquoi cette retransmission publique de son calvaire ? Au nom de l’égalité ! Au nom du devoir de transparence ! Voilà comment l’on transforme, salit et déshonore des principes qui ont eu leur noblesse. L’égalité ? Tous les acteurs élus de cette cérémonie - car ils sont tous élus, la juge comme les policiers - savaient que Strauss-Kahn n’était pas un homme comme les autres et qu’il ne serait pas également traité par la meute des journalistes, des photographes et de cameramen qui l’attendaient.
C’était au contraire une inégalité savamment organisée et appliquée. La transparence ? Mais laquelle ? Ou a-t-on entendu un juge quelconque donner le détail des chefs d’accusation, tous les détails mais surtout les preuves.
Car c’est bien cela, la présomption d’innocence. Si l’on renonce à présumer innocent un accusé, alors, il faut justifier ce renoncement en disant sur quelles preuves on s’appuie. C’est là l’essentiel.
Or jusqu’ici, on ne nous a présenté aucune preuve, se contentant de dire que si l’on maintenait Dominique Strauss Kahn en prison, "ce n’était pas pour rien" et aussi par crainte qu’il ne s’enfuie s’il était mis en liberté provisoire. C’est cela le plus choquant, ce raisonnement qui revient à dire "Il n’y a pas de fumée sans feu", ou encore "Pensez-vous que nos juges élus, qui représentent le peuple américain, enverraient dans une prison de bagnards l’un des plus hauts fonctionnaires internationaux sans savoir ce qu’ils font ?".
Car ces hommes responsables de la mise à mort de DSK sont des représentants du peuple, au même titre que les sénateurs ou les membres du Congrès.
Supposons, oui, j'accepte cette supposition, que Dominique Strauss-Kahn soit réellement l'auteur de ce dont la femme de chambre l'accuse, dans ce cas-là, elle serait la victime et il ne faudrait pas l'oublier.
Et le présent texte n'a pas pour objet d'innocenter un coupable et d'accabler une innocente. Supposons que la juge américaine ait pensé avoir de très bonnes raisons de maintenir en détention un présumé innocent et d'offrir à la foule le spectacle d'un homme désigné à une sorte de lynchage médiatique.
Tous nos arguments demeureraient les mêmes. Pour éviter le lynchage et la vindicte populaire, on a inventé la présomption d'innocence. Cela ne veut pas dire que cela doive profiter si peu que ce soit à une éventuelle victime.
Si jamais les preuves étaient données de la culpabilité de Dominique Strauss-Kahn, cela ne justifierait en rien le manquement aux principes et les vices de procédure. Simplement, en ce qui nous concerne, nous serions scrupuleusement attentifs et compréhensifs pour cette femme de chambre que l'on décrit comme digne et à l'abri de tout soupçon.
L’année dernière, j’ai eu l’impression que s’ouvrait un fossé entre le peuple américain et nous. J'ai même pensé que nous n'appartenons pas à la même civilisation. Or, au moment où j'écris, je vois que de grandes voix se sont élevées pour exprimer un point de vue très proche du nôtre. Ce serait un immense soulagement si elles arrivaient à dominer l'hystérie de la majorité des commentaires.
Jean Daniel - Le Nouvel Observateur
Le sort infligé à DSK par la justice américaine, par la conception que nous avons de la transparence, par le règne de l’image, bref par les lois nouvelles de notre métier, ce sort est tout simplement épouvantable.
Nous avons assisté à l’organisation médiatique d’une mise à mort, comme dans une corrida où l’on sait que le taureau va mourir, sauf qu’il n’y avait cette fois aucun torero qui prenne des risques. Strauss-Kahn donnait bien l’impression d’un taureau blessé qui met un genou à terre et attend l’estocade.
Il avait l’air de dire : "Finissons-en puisque vous voulez ma mort." Pourquoi cette retransmission publique de son calvaire ? Au nom de l’égalité ! Au nom du devoir de transparence ! Voilà comment l’on transforme, salit et déshonore des principes qui ont eu leur noblesse. L’égalité ? Tous les acteurs élus de cette cérémonie - car ils sont tous élus, la juge comme les policiers - savaient que Strauss-Kahn n’était pas un homme comme les autres et qu’il ne serait pas également traité par la meute des journalistes, des photographes et de cameramen qui l’attendaient.
C’était au contraire une inégalité savamment organisée et appliquée. La transparence ? Mais laquelle ? Ou a-t-on entendu un juge quelconque donner le détail des chefs d’accusation, tous les détails mais surtout les preuves.
Car c’est bien cela, la présomption d’innocence. Si l’on renonce à présumer innocent un accusé, alors, il faut justifier ce renoncement en disant sur quelles preuves on s’appuie. C’est là l’essentiel.
Or jusqu’ici, on ne nous a présenté aucune preuve, se contentant de dire que si l’on maintenait Dominique Strauss Kahn en prison, "ce n’était pas pour rien" et aussi par crainte qu’il ne s’enfuie s’il était mis en liberté provisoire. C’est cela le plus choquant, ce raisonnement qui revient à dire "Il n’y a pas de fumée sans feu", ou encore "Pensez-vous que nos juges élus, qui représentent le peuple américain, enverraient dans une prison de bagnards l’un des plus hauts fonctionnaires internationaux sans savoir ce qu’ils font ?".
Car ces hommes responsables de la mise à mort de DSK sont des représentants du peuple, au même titre que les sénateurs ou les membres du Congrès.
Supposons, oui, j'accepte cette supposition, que Dominique Strauss-Kahn soit réellement l'auteur de ce dont la femme de chambre l'accuse, dans ce cas-là, elle serait la victime et il ne faudrait pas l'oublier.
Et le présent texte n'a pas pour objet d'innocenter un coupable et d'accabler une innocente. Supposons que la juge américaine ait pensé avoir de très bonnes raisons de maintenir en détention un présumé innocent et d'offrir à la foule le spectacle d'un homme désigné à une sorte de lynchage médiatique.
Tous nos arguments demeureraient les mêmes. Pour éviter le lynchage et la vindicte populaire, on a inventé la présomption d'innocence. Cela ne veut pas dire que cela doive profiter si peu que ce soit à une éventuelle victime.
Si jamais les preuves étaient données de la culpabilité de Dominique Strauss-Kahn, cela ne justifierait en rien le manquement aux principes et les vices de procédure. Simplement, en ce qui nous concerne, nous serions scrupuleusement attentifs et compréhensifs pour cette femme de chambre que l'on décrit comme digne et à l'abri de tout soupçon.
L’année dernière, j’ai eu l’impression que s’ouvrait un fossé entre le peuple américain et nous. J'ai même pensé que nous n'appartenons pas à la même civilisation. Or, au moment où j'écris, je vois que de grandes voix se sont élevées pour exprimer un point de vue très proche du nôtre. Ce serait un immense soulagement si elles arrivaient à dominer l'hystérie de la majorité des commentaires.
Jean Daniel - Le Nouvel Observateur
Nota: Sabe Jean Daniel e sabemos todos que nós, europeus, e os americanos, não pertencemos à mesma civilização. Não sei, mesmo, se existe nos EUA (não confundir com o resto do continente americano onde vive gente decente), civilização. É um assunto a que regressaremos mais tarde.
2 comentários:
As pessoas que vivem em países pequenos, meio periférico, habituados à pobreza e emigração, ao sacrifício e à renúncia como o nosso e tantos outros na Europa, ou em países onde a repressão está na ordem do dia como calculo seja hoje em dia o caso da Síria ou do Irão, ou em países com histórias de sofrimento que alcançaram a democracia a muito custo como Timor, enfim, os mais ou menos pequenos deste mundo, se quiserem aprender, saber, informar-se têm que ir beber a várias fontes, comparar, aprender outras línguas para não ficar no provincianismo mais completo, desenvolver capacidade de crítica e auto-crítica (de que os portugueses abundam e que extravasa por vezes em complexo de inferioridade) e lutar, lutar, lutar, estudar, estudar, estudar. Mas os Norte Americanos ... ? Este povo que tem tudo, cujo país compra ou tira aos outros o que porventura não tem, que não precisa de aprender língua nenhuma para viajar e fazer-se entender, cujo estado é um mundo em si, que pode viajar por milhares de km sem saír dos confins do seu país, que está habituado a sentir-se e comportar-se como dono e senhor de um mundo que sente que comprou e que vive deitado aos seus pés ? É um menino mimado que de tanto ter e querer e ter ainda mais, nada mais ambiciona e nada mais vé nem percebe para além dos limites da sua própria tacanha, pueril e teimosa ignorância.
Valeria
O editorial de Jean Daniel é realmente notável. Pena não estar traduzido para português, pois nem todos os leitores dominam bem o francês. Não há dúvida que com sexo ou sem sexo se trata de uma conspiração ao mais alto nível. A juíza do caso, que mais parece uma prostituta do Intendente, com o devido respeito às autênticas putas, representa bem a escória de que é composta a América, um país que nunca se deverá visitar por uma questão de saúde mental.
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