segunda-feira, 25 de março de 2019

A EUROPA AINDA É CRISTÃ?



O politólogo e islamólogo francês Olivier Roy (n. 1949), autor de vasta obra, nomeadamente sobre o mundo islâmico, publicou agora L'Europe est-elle chrétienne?,  onde se debruça sobre a identidade cristã do Velho Continente e sobre a sua relação com o secularismo e o islão. Investigador em vários países da Ásia  central, Olivier Roy é desde 2009 professor do Instituto Universitário Europeu de Florença.

Afirma Olivier Roy: «Le débat sur l'identité chrétienne de l'Europe ne repose pas sur une opposition binaire Europe-islam, mais sur un triangle dont les trois pôles sont  1) la religion chrétienne; 2) les valeurs séculières de l'Europe (même si elles sont parfois référées à une identité chrétienne); 3) l'islam comme religion. "L'islam est-il compatible avec... (au choix) la démocratie, les valeurs européennes, la laïcité, etc.?" pose en fait une autre question: qu'opposons-nous à l'islam? Le christianisme ou les Lumières? On ne peut pas s'en sortir par une pirouette en affirmant que la laïcité est fille de l'Église ou que l'Église aujourd'hui a intégré le message des Lumières: l'Église s'est bien lancée avec Benoït XVI dans une critique de l'idéologie des Lumières, et il a été suivi par nombre d'intellectuels catholiques (Rémi Brague, Pierre Manent)." (p. 10)

Segundo o autor, por trás do debate sobre o islão esconde-se o debate mais profundo sobre a própria natureza da Europa, e sobre a sua relação com o religioso em geral. A ideia que, se não existisse islão nem imigração, tudo  caminharia bem, é uma ilusão. Há uma grave crise sobre a definição da identidade europeia e sobre o lugar do religioso, como o mostram a radicalização católica à volta da questão do aborto e do casamento para todos e a radicalização laica à volta de questões como o abate ritual, a circuncisão (e aqui não é apenas o islão mas também o judaísmo), o segredo da confissão, etc. O que na verdade se verifica é uma crise da cultura europeia.

Como o livro está recheado de oportunas observações sobre essa crise que se abate sobre nós, é conveniente a leitura integral da obra.  Mas não deixaremos de referir alguns aspectos que consideramos importantes.

«Incidemment, on mentionne souvent aujourd'hui une Europe "judéo-chrétienne", mais l'expression n'a pas de sens. Si c'est pour dire que le christianisme trouve son origine dans le judaïsme, c'est redondant, et les juifs ne se reconnaissent pas dans ce que l'Église a fait de son héritage hébraïque. Si c'est pour dire que le judaïsme en tant que tel a joué un rôle clé dans la construction de l'identité européenne, c'est un malentendu. Ce qui est passé du judaïsme au christianisme, c'est ce que l'Église a bien voulu y laisser passer, et elle n'a pas laissé passé grand-chose; elle a par exemple banni le Talmud, si important dans la traduction juive. Pour l'Église, l'un des pires péchés consistait à "judaïser" le catholicisme (être un "judéo-chrétien", dans l'Espagne du XVIe siècle, pouvait conduire au bûcher). Le ghetto était bien une mise ã l'écart. Et l'Église a fait la police de ce qui pouvait sortir du ghetto. Quand la culture juive est passé au XIXe siècle dans le champ de la culture dominante, ce qu'on appelle métaphoriquement la "sortie du ghetto" (et qui a parfois un aspect très concret), ce fut l'essor de la grande culture yiddish qui, bien qu'influencée par la religion, est une culture séculière qui s'est surtout développée dans l'Europe de l'Est.» (p. 15)

«En quel sens, après 1648, l'Europe est-elle toujours chrétienne? Certes, il n'y a plus une christianité: il faut désormais choisir entre protestantes et catholiques. Mais, surtout, se développe à partir du XVIIIe siècle ce qu'on appelle communément la "sécularisation". Celle-ci renvoie à deux phénomènes différents, qui peuvent ou non coincider. (p. 37)

La première forme de sécularisation repose sur un concept juridique et constitutionnel: c'est l'autonomie du politique, conduisant soit à la séparation de l'État des institutions religieuses (France, États-Unis), soit au contrôle du religieux par le politique: le gallicanisme dans le royaume de France, le joséphisme dans l'empire des Habsbourg, et l'on pourrait sans doute ajouter aujourd'hui les Églises d'État dans les pays scandinaves ainsi que les États concordataires, où certaines religions ou Églises ont un statut officiel, mais dans un cadre défini et limité par les pouvoirs publics (comme en Belgique et en Allemagne). Cette hégémonie du politique est ce qu'on appelle en France la laïcité (même si le  mot n'apparaît pas dans la loi de 1905 et même s'il a pris une connotation plus idéologique que juridique au cours du XXe siècle). La seconde forme de sécularisation relève de la sociologie: elle est définie par la chute de la pratique religieuse et la disparition de la centralité du religieux dans la vie sociale et la culture: c'est ce qu'on appelle en Europe la déchristianisation.» (pp. 37-8)

«Jusqu'à la Première Guerre mondiale, l'Église a donc deux ennemis: le libéralisme en politique (donc la démocratie) et le relativisme (c'est-à-dire la tolérance) du point de vue théologique. Sur ce dernier plan, elle défend en réalité son monopole de la vérité, non seulement en religion, mais pour tout ce qui touche à la morale et aux valeurs. Les différentes encycliques sont claires sur ce point: l'Église refuse la remise en cause de son magistère.» (pp. 63-4)

«Dans les exemples de conflits avec les États que nous avons cités, la question ne concerne en effet pas tant les valeurs que l'autorité, ou ce qui les fonde et les justifie. Lorsque, comme dans le Kulturkampf, l'Église et l'État s'oppose sur le mariage civil, ce n'est pas la définition de famille qui est en jeu, mais le contrôle de la société civil. Là où l'Église est puissante, il n'y a pas de légalisation du divorce. Sauf que, à l'époque, l'interdiction de l'avortement était portée par les nationalistes, et non pas par l' Église: en France, c'est la Chambre "bleu horizon" qui criminalise l'avortement et la contraception en 1920, alors que déjà le Code napoléonien l'avait fait en 1810, et pour les mêmes raisons: favoriser la natalité afin de disposer de soldats. De manière plus générale, quand la contestation féminine apparaît (avec le  mouvement des suffragettes qui demand le droit de vote), ce n'est pas l'Église que les femmes trouvent en face d'elles, mais bien quasiment l'ensemble des forces politiques. Quant à l'homosexualité, elle est criminalisée un peu partout en Europe (davantage dans les pays protestants que dans les pays catholique, du fait que, dans les premiers, l'État séculier prend en charge la question des valeurs: l'Allemagne, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, le Danemark, la Norvège et la Finlande criminalisent encore l'homosexualité après 1945, alors qu'en France et en Italie elle est en générale gérée sous la rubrique de l' "atteinte aux bonnes moeurs").» (pp. 64-5)

«Elle [a Igreja] oppose encore et encore la vérité au relativisme. Pour elle, la société européenne n'est plus simplement profane: elle est devenue païenne, voire "christianophobe". Et comme cette société tourne le dos à ce que l'Église appelle la "culture de la vie", c'est-à-dire le refus de l'avortement et la centralité de la reproduction dans le cadre naturel de la famille, elle devient une "culture de mort" (expression qui revient douze fois, en 1995, dans l'encyclique Evangelium vitae du pape Jean-Paul II sur "la valeur et l'inviolabilité de la vie humaine")» (pp. 102-3)

«Ce qui assurait le "pont" entre croyants et incroyants, á savoir un fonds commun de valeurs chrétiennes sécularisées, s'estompe ou disparaît. Les conséquences sont profondes, et à coup sûr elles inaugurent un monde nouveau où les communautés de foi sont, et surtout se vivent, comme des minorités sous pression (même si une droite catholique conservatrice rêve toujours d'une reconquête en chevauchant la vague populiste). Mais cela pose une question plus grave: si l'Église ne reconnaît plus comme chrétienne la culture qui domine l'Europe d'aujourd'hui, qui peut se permettre de revendiquer l'identité chrétienne de l'Europe, et comment la revendiquer sinon comme un programme de reconquête, dirigé moins contre l'islam (qui souvent partage les valeurs familiales défendues par l'Église) que contre la société européenne elle-même?» (p. 104)

«Le débat sur la Constitution de l'Europe, approuvée en 2004, marque un tounant: faut-il y inscrire l'identité chrétienne de l'Europe (sous forme de référence à ses "racines chrétiennes")? La demande émane de députés européens chrétiens qui, en quelque sorte, veulent réparer "l'oubli" des pères fondateurs. Mais si cette référence est finalement rejetée (en particulier parce que la France la refuse au nom de la laïcité), le débat se poursuit et prendre même de l'ampleur. Trois courants s'opposent ici:
- L'Église, pour qui la référence à l'identité est d'abord un moyen d'ancrer les valeurs qu'elle défend dans la définition même de l'Europe. Elle parle à la fois d'identité et de valeurs chrétiennes, et pousse donc à la reconnaissance des racines chrétiennes de l'Europe dans la Constitution, en faisant du lobbying actif auprès de "Bruxelles" pour défendre les "principes non négociables".
- Les partis et mouvances populistes, pour qui il importe de s'opposer d'abord à l'islam. Ils défend l'identité comme telle, référée à des groupes nationaux ou régionaux plutôt qu'à l'Europe elle-même. Ils ne mettent pas en avant des valeurs.
- Les "sécularistes" (les "laïques" en France) qui, tout en reconnaissant éventuellement l'héritage chrétien de l'Europe, mettent an avant les Lumières, les droits humains et surtout les acquis des années 1960: liberté sexuelle, contraception, avortement, égalité hommes-femmes, féminisme, droits LGBT. Ceux-là parleront de "valeurs européennes" (ou de "valeurs républicaines" pour la France) par opposition aux normes religieuses en général, jugées rétrogrades ou contraires aux droits humains. Pour eux, l'islam est la forme contemporaine exacerbée d'un absolutisme religieux que l'Europe a combattu, et vaincu, dans le passé.» (pp. 135-6-7)

No último capítulo, o autor interrgoga-se sobre se é o fim da Europa cristã ou o fim da religião que está em causa. E considera que o islão foi um acelerador da evolução religiosa na Europa. Desde há 30 anos (a primeira crise do foulard islâmico, em França, verificou-se em 1989), é a relação com o islão que domina a questão religiosa em toda a Europa. A secularização tem sido acelerada pelas decisões dos tribunais: as leis sobre os sinais religiosos (o crucifixo, a sotaina, a kippa, o véu islâmico); a circuncisão; o abate ritual; a blasfémia; o desmantelamento da imunidade clerical («En juin 2018, le Parlement du territoire de la capitale australienne a voté l'interdiction du secret de la confession en ce qui concerne la pédophilie. Mais comme dit l'archevêque de Canberra, Mgr Prowse, c'est aussi "une intrusion dans la vie sacramentale de l'Église", car la confession est la condition de l'eucharistie et donc du salut. Si le pêcheur ne se confesse pas de peur d'être denoncé, alors l'objet même de l'Église, le salut des âmes, est mis en cause. Certains diront qu'il ne s'agit que du cas des abus sexuels, mais on peut supposer que, devant l'exigence croissance de transparence dans nos sociétés, la liste des crimes et délits annulant le secret de la confusion ne fera que s'étendre et que seuls les masturbateurs pourront prétendre au salut éternel.») (p. 174)... «Cette ingérence du séculier dans le théologique touche toutes les religions. Chefs les juifs pratiquants, la halakha stipule qu'une femme divorcée ne peut pas se remarier religieusement sans une autorisation de son ex-mari, le get. Les tribunaux civils ne devraient pas se préocuper de cela, et pourtant, même en France, ils le font au nom du préjudice moral, ce qui revient à la fois à reconnaître le poids du religieux, mais aussi à le "domestiquer" et à le psychologiser (croire c'est souffrir). Quant à l'islam, une pétition en France exigeait récemment la suppression de versets du Coran, sans bien sûr se demander la suppression des versets très similaires dans les livres de l'Exode ou du Lévitique. Mais les pétitionaires l'auraient-ils fait que cela ne changerait: exiger la correction d'un texte sacré, c'est affirmer la relativité de toute révélation religieuse, c'est miner le fait religieux lui-même, c'est séculariser.» (p. 176-7)

A defesa da identidade cristã tem contribuído largamente para a secularização das sociedades europeias.  Uma questão interessante foi a proibição na Suiça, por referendo em 2009, dos minaretes nas mesquitas. «Si l'on interdit le minaret comme objet "culturel", c'est qu'il rentre en contradiction avec la culture suisse, dans sa dimension architecturale et paysagère. L'argument de l'État suisse contribue à déculturaliser l'islam traditionnel et donc paradoxalement à le rendre compatible avec l'Europe.» (p.183)

Concluindo: «Tant du côté de la laïcité que des religions, les valeurs reviennent aujourd'hui sous la forme de la norme. La crise n'est pas simplement une crise des valeurs, mais de la référence même à la valeur. En effet, sur quoi la fonder?» (p. 189)

O livro fornece uma importante compilação de dados e uma lúcida reflexão sobre a questão abordada. Todavia, a organização das matérias poderia, em minha opinião, ser estruturada de forma mais acessível a uma leitura sequencial. Isso não impede que a obra represente uma contribuição relevante para a discussão em curso sobre a identidade cristã da Europa. Os trechos que se transcreveram representam tão só um apontamento das opiniões do autor acerca de alguns dos problemas com que se confronta o Ocidente.

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