Pela sua pertinência, transcrevemos do blogue "La République des livres", do escritor francês Pierre Assouline, o texto do filósofo tunisino Mezri Haddad sobre as declarações de Bernard-Henri Lévy:
Non Bernard-Henri Lévy, ce n'est pas le djihadisme qui est un fascisme mais l'islamisme
FIGAROVOX/TRIBUNE
- Dans son entretien avec le Figaro, Bernard-Henri Lévy avait déclaré
que «le djihadisme est un fascisme». Une erreur, selon le philosophe
tunisien Mezri Haddad, pour qui le véritable adversaire n'est pas le
djihadisme mais l'islamisme.
Ancien ambassadeur de la Tunisie auprès de l'UNESCO, Mezri Haddad est philosophe, auteur d'essais sur la réforme de l'islam.
Contrairement au politique dont la «fonction» est de se tromper toujours, le métier de philosophe serait-il d'avoir raison, même lorsqu'il se trompe, pour paraphraser l'irrévérent Sartre après la publication de L'Archipel du Goulag par Soljenitsyne? Non, bien évidemment, l'essence de la philosophie, la vocation même du philosophe est dans cette quête perpétuelle de la vérité, intrinsèquement liée à la conquête de la connaissance.
D'où le rôle bénéfique que peut jouer le philosophe auprès du prince, nonobstant la critique tardive de Diderot qui, après avoir bien profité de la générosité des princes, tout comme Voltaire d'ailleurs, a décrété qu'un philosophe peut perdre son âme à trop fréquenter les antichambres des princes. A défaut d'être roi, comme le stipulait l'utopie platonicienne, le philosophe peut et doit en être l'éclaireur. La relation entre le politique et le philosophe se ramène finalement au binôme Savoir-Pouvoir, que la sagesse romaine pratiquait sous la forme de l'auctoritas et de la potestas, et que la sagacité musulmane perpétuait sur le modèle du Hukm et de la Sulta.
C'est pour dire à Bernard Henri-Lévy que je ne suis pas de ceux, idiots ou envieux, qui lui reprocheraient ses ingérences en politique, une ineptie découlant de l'ignorance totale et de la philosophie et de l'essence du politique. Bien au contraire, je lui sais gré d'avoir contribué comme d'autres, à la restauration et à l'importance irréductible du philosophe dans la cité. Aristotélicien et averroïste, je dirai même que la philosophie n'a pas de sens en dehors de la politique et que le déclin de la philosophie s'est déclenché dès lors où on a voulu la cantonner dans les méandres de la métaphysique. De Socrate à Sartre, en passant par Machiavel, Spinoza, Averroès, Ibn Khaldûn, Voltaire, Rousseau…, philosophie et politique ont toujours été consubstantiellement et intimement liées.
Je lui reprocherai plutôt ses égarements, ses errements et, plus grave encore, son ignorance de la pensée philosophique et théologique islamique. De même que c'est à partir d'une fausse prémisse qu'on arrive à une fausse conclusion, c'est partant d'une connaissance imparfaite de l'islam et du monde musulman que l'on arrive à épouser l'islamisme «modéré» et à soutenir les hordes fanatisées du «printemps» dit arabe. Facteur aggravant, BHL persiste et signe. Et c'est là qu'il trahi, me semble t-il, sa vocation de philosophe, en suivant ce que la doxa désire et non guère ce que l'épistémè exige. Ce faisant, il n'est plus philosophe mais politique. Nous savons bien avant Max Weber qu'il est très difficile d'être à la fois homme de science et homme de pouvoir sans sacrifier l'une des deux vocations.
BHL connait mal l'islam, encore moins sa subversion: l'islamisme. Il dit que «Le djihadisme est un fascisme, non par métaphore mais par définition». Non Monsieur, c'est l'islamisme lui-même qui est par définition, par essence, par axiologie et par étiologie une idéologie néo-fasciste. C'est l'islamisme des Frères musulmans (1928) qui est la cellule mère du djihadisme, du khomeynisme, du talibanisme, d'Al-Qaïda, du Hamas, de Boko haram, d'Ansars al-charia, de l'AKP, d'Ennahda, du FIS… Si ces métastases terminologiques, ces excroissances et ramifications peuvent brouiller l'analyse et troubler la rationalité occidentale, elles n'empêchent pas le philosophe musulman de voir ce qui les unie toutes et ce qui constitue leur fondement commun, à savoir l'indissociabilité du temporel et du spirituel, du sacré et du profane, du religieux et du politique. La différence entre un Erdogan ou un Ghannouchi et un Ben Laden ou Abou Bakr al-Baghdadi, calife auto-proclamé de l'EIIL, n'est donc pas une différence de nature mais de stratégie ou plus exactement de tactique. En cela, la perspective machiavélienne centrée sur le réajustement des moyens par rapport aux fins, devrait davantage nous éclairer: dans la doctrine islamiste, l'islam est un moyen religieux au service d'une fin politique, le pouvoir, tout le pouvoir, rien que le pouvoir.
Nécrose de la civilisation islamique, altération de la religion musulmane, l'islamisme est une idéologie néo-fasciste, théocratique et totalitaire. Il n'est pas l'incarnation de l'islam mais son incarcération. C'est une «religion séculière», pour emprunter cette expression à Raymond Aron par laquelle il définissait le nazisme et le communisme. C'est là que BHL a parfaitement raison lorsqu'il qualifie le «fascislamisme» de dernière forme de totalitarisme moderne à combattre, parce qu'il constitue un péril, pas seulement pour le monde musulman mais aussi pour le monde occidental. S'adressant récemment au corps diplomatique en Arabie Saoudite, le roi Abdallah -qui sait de quoi il parle!- a déclaré que «S'ils ne réagissent pas, l'Europe et les USA vont avoir les djihadistes chez eux dans un mois»!
Et ce combat est celui de la philosophie contre le sophisme, de l'autonomie contre l'hétéronomie, de l'altérité contre l'identité, du savoir contre l'ignorance, de l'herméneutique contre l'intégralisme exégétique, de la vérité contre le mensonge, de la raison contre la passion, de la pédagogie contre la démagogie, des Lumières contre l'obscurantisme, de la sécularisation contre le cléricalisme, de la liberté contre le totalitarisme. Et c'est à ce combat décisif que BHL doit revenir, car il s'en est bien éloigné, tout égaré qu'il fut dans le désert libyen…
Nota: Apesar de tudo, observo que Mezri Haddad é muito simpático em relação a Bernard-Henri Lévy que, em minha opinião, não merece a mínima consideração.
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