«Je me revois aussi sous l'aspect d'un homme bronzé, dans la soixantaine, sans un pouce de graisse, dispos, mais accusant malgré tout quelques ravages. L'impulsion sexuelle - les hommes de mon âge ne manquent pas de le savoir - ne meurt pas avec les ans: elle devient seulement intermittente, tout en n'abdiquant presque rien de ses anciennes fureurs lors de ses résurgences. Elle a besoin, cependant, d'être stimulée par la jeunesse et la beauté, ce qui implique une certaine unilatéralité de passion. Car est-il jeunesse, est-il beauté qui - exception faite des cas de gérontophilie perverse - puissent être stimulées en retour par des rides et des cheveux gris? Il est vrai que, au fur et à mesure que j'approche des dernières infirmités, c'était de compagnie que j'avais besoin plutôt que d'un partenaire en amour, mais sans que ce fût, comme dans le mariage, la compagnie de quelqu'un de ma génération. Ce que je voulais, c'était une amitié avec des connotations de l'excitation amoureuse, c'est-à-dire l'électricité du toucher, de l'enlacement, des mots tendres, et tout ce qui avait de rassurant, dans la nuit, la présence d'un corps, du moment qu'il était jeune et charmant, respirant à côté de moi. J'étais reconnaissant s'il s'y ajoutait le don de l'intelligence, d'autant plus piquant qu'il y manquait une expérience relative du monde.»
ANTHONY BURGESS, in "Les puissances des ténèbres", capítulo 60 (edição francesa de 1981)
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