Em 2005, Jacques Rancière (que vem ao CCB amanhã, dia 17, fazer uma conferência integrada no ciclo "Políticas da Estética: O Futuro do Sensível") publicou um interessante ensaio intitulado La haine de la démocratie, um livro breve mas profundo na sua análise do tema.
Começa o eminente filósofo por escrever: «La haine de la démocratie n'est certes pas une nouveauté. Elle est aussi vieille que la démocratie pour une simple raison: le mot lui-même est l'expression d'une haine. Il a d'abord été une insulte inventée, dans la Grèce antique, par ceux qui voyaient la ruine de tout ordre légitime dans l'innommable gouvernement de la multitude. Il est resté synonyme d'abomination pour tous ceux qui pensaient que le pouvoir revenait de droi à ceux qui y étaient destinés par leur naissance ou appelés par leurs compétences. Il l'est encore aujourd'hui pour ceux qui font de la loi divine révélée le seul fondement légitime de l'organisation des communautés humaines. La violence de cette haine est certes d'actualité. Ce n'est pourtant pas elle qui fait l'objet de ce livre, pour une simple raison: je n'ai rien en commun avec ceux qui la profèrent, donc rien à discuter avec eux.» (p. 8)
«Le double discours sur la démocratie n'est certes pas neuf. Nous avons été habitués à entendre que la démocratie était le pire des gouvernements à l'exception de tous les autres. Mais le nouveau sentiment antidémocratique donne de la formule une version plus troublante. Le gouvernement démocratique, nous dit-il, est mauvais quand il se laisse corrompre par la société démocratique qui veut que tous soeint égaux et toutes les différences respectées. Il est bon, en revanche, quand il rappelle les individus avachis de la société démocratique à l'énergie de la guerre défendant les valeurs de la civilisation qui sont celles de la lutte des civilisations. La nouvelle haine de la démocratie peut alors se résumer en une thèse simple: il n'y a qu'une seule bonne démocratie, celle qui réprime la catastrophe de la civilisation démocratique. (pp. 9-10)
No primeiro capítulo, "De la démocratie victorieuse à la démocratie criminelle", o autor procede a uma abordagem de múltiplos aspectos, detendo-se na imposição da democracia pela força das armas (Iraque). Considera também que o excesso de vitalidade democrática é prejudicial à democracia e que deve ser compensado pela procura da felicidade individual e das relações sociais. (p. 14) Mais adiante, analisa a tese de Jean-Claude Milner no seu livro Les Penchants criminels de l'Europe démocratique (2003). Prosseguindo, Rancière explora sucessivas contradições da democracia para desenvolver o seu pensamento. Interroga-se se, face ao conflito israelo-palestiniano, Israel é realmente uma democracia e coloca a questão de saber se, em determinada perspectiva, a Revolução Francesa não terá sido um acto terrorista, não por ter reconhecido os direitos dos indivíduos mas por tê-los consagrado (pp. 20-21). Detendo-se em Giorgio Agamben (Homo sacer I. Le pouvoir souverain et la vie nue), refere a análise deste quando considera que o "estado de excepção" é o conteúdo real da nossa democracia (p. 23).
Não é possível desenvolver neste post o raciocínio complexo e multi-disciplinar de Jacques Rancière e a vasta abordagem que faz do tema, já de si de extraordinária amplitude. Para uma perfeita compreensão do leitor seria necessário transcrever integralmente o livro. Assim, teremos de limitar-nos a algumas citações mais importantes, que lançam algumas pistas, procedendo também a alguns comentários, quando julgados pertinentes.
«Pour faire de Tocqueville le prophète du despotisme démocratique et le penseur de la société de consommation, il faut réduire ses deux gros livres à deux ou trois paragraphes d'un seul chapitre du second qui évoque le risque d'un despotisme nouveau. Et il faut encore oublier que Tocqueville redoutait le pouvoir absolu d'un maître, disposant d'un État centralisé, sur une masse dépolitisée, et non cette tyrannie de l'opinion démocratique dont on nous rebat aujourd'hui les oreilles. La réduction de son analyse de la démocratie à la critique de la société de consommation a pu passer par quelques relais interprétatifs privilégiés. Mais elle est surtout le résultat de tout un processus d'effacement de la figure politique de la démocratie, qui s'est opéré à travers un échange réglé entre description sociologique et jugement philosophique.» (p. 27)
«À mesure que le narcissisme croît, écrivait Lipovetsky, la légitimité démocratique l'emporte, fût-ce sous le mode cool. Les régimes démocratiques, avec leur pluralisme de partis, leurs élections, leur droit à l'information sont en parenté de plus en plus étroite avec la société personnalisée du libre service, du test et de la liberté combinatoire [...] Ceux-là mêmes qui ne s'intéressent qu'à la dimension privée de leur vie restent attachés par des liens tissés par le procès de personnalisation au fonctionnement démocratique des sociétés. (Gilles Lipovetsky, L'Ère du vide)» (p.29)
«[Baudrillard] dénonçait les illusions d'une "personnalisation" entièrement soumise aux exigences marchandes et voyait dans les promesses de la consommation la fausse égalité qui masquait "la démocratie absente et l'égalité introuvable. (Jean Baudrillard, La société de consommation)» (p. 29)
«En face de lui, le "potache qui réclame contre Platon ou Kant le droit à sa propre opinion" est le représentant de l'inexorable spirale de la démocratie ivre de consommation, témoignant de la fin de la culture, à moins que ce ne soit du devenir culture de toute chose, de "hypermarché des styles de vie", de la "club-méditerranéisation du monde" et de "l'entrée de l'existence tout entière dans la sphère de la consommation" (Alain Finkielkraut, L'Imparfait du présent)» (p. 34)
«La démocratie, nous dit Platon au livre VIII de La République, est un régime politique qui n'est pas un. Elle n'a pas une constitution, car elle les a toutes. Elle est un bazar aux constitutions, un habit d'arlequin tel que l'aiment des hommes dont la consommation des plaisirs et des droits est la grande affaire. Mais elle n'est pas seulement le règne des individus faisant tout à leur guise. Elle est proprement le renversement de toutes les relations qui structurent la société humaine: les gouvernants ont l'air de gouvernés et les gouvernés de gouvernants; les femmes sont les égales des hommes; le père s'accoutume à traiter son fils en égal; le metèque et l'étranger deviennent les égaux du citoyen; le maître craint et flatte des élèves qui, pour leur part, se moquent de lui; les jeunes s'égalent aux vieux et les vieux imitent les jeunes; les bêtes mêmes sont libres et les chevaux et les ânes, conscients de leur liberté et de leur dignité, bousculent dans la rue ceux qui ne leur cèdent pas le passage.» (pp. 42-43)
«Tel est le fond du problème. Il y a un ordre naturel des choses selon lequel les hommes assemblés sont gouvernés par ceux qui possèdent les titres à les gouverner. L'histoire a connu deux grands titres à gouverner les hommes: l'un qui tient à la filiation humaine ou divine, soit la superiorité dans la naissance; l'autre qui tient à l'organisation des activités productrices et reproductrices de la société, soit le pouvoir de la richesse. Les sociétés sont habituellement gouvernées par une combinaison de ces deux puissances auxquelles force et science portent, en proportions diverses, leur renfort.» (p. 43)
«L'évidence qui assimile la démocratie à la forme du gouvernement représentatif, issu de l'éléction, est toute récente dans l'histoire. La représentation est dans son origine l'exact opposé de la démocratie. Nul ne l'ignore au temps des révolutions américaine et française.» (p. 60)
«Ce qu'on appelle "démocratie représentative" et qu'il est plus exacte d'appeler système parlementaire ou, comme Raymon Aron, "régime constitutionnel pluraliste", est une forme mixte: une forme de fonctionnement de l'État, initialement fondée sur le privilège des élites "naturelles" et détournée peu à peu de sa fonction par les luttes démocratiques.» (p. 61)
«C'est ce déplacement inhérant à la politique elle-même que refuse l'idéologie dite républicaine. Celle-ci réclame le stricte délimitation des sphères du politique et du social et identifie la république au règne de la loi, indifférente à toutes les particularités. C'est ainsi qu'elle a, dans les années 1980, argumenté sa querelle sur la réforme de l'École. Elle a propagé la simple doctrine d'une École républicaine et laïque distribuant à tous le même savoir sans considération des différences sociales. Elle a posé comme dogme républicain la séparation entre l'instruction, c'est-à-dire la transmissions des savoirs, qui est affaire publique, et l'éducation qui est affaire privée. Elle a alors assigné comme cause à la "crise de l'École" l'invasion de l'institution scolaire par la société et a accusé les sociologues de s'être faits les instrumens de cette invasion en proposant des réformes qui consacraient la confusion de l'éducation et de l'instruction.» (p. 70)
«C'est aussi pourquoi l'École républicaine est d'emblée partagée entre deux visions opposées. Le programme de Jules Ferry repose sur une équation postulée entre l'unité de la science et l'unité de la volonté populaire. Identifiant république et démocratie comme un ordre social et politique indivisible, Ferry revendique, au nom de Condorcet et de la Révolution, un enseignement qui soit homogène du plus haut au plus bas degré.» (p. 73)
«Elle [la démocratie individualiste] commence à se révolter même contre la différence des sexes et contre les obligations que cette différence entraîne: pourquoi éléver les femmes autrement que les hommes, et à part, et pour des professions différentes? Mettons-les tous ensemble au même régime et au même brouet scientifique, historique et géographique, aux mêmes exercises géométriques; ouvrons à tous et à toutes également toutes les carrières [...] L'individu anonyme, insexuel, sans ancêtres, sans tradition, sans milieu, sans lien d'aucune sorte, voilà - Taine l'avait prévu - l'homme de la fausse démocratie, celui qui vote et dont la voix compte pou un, qu'il s'appele Thiers, Gambetta, Taine, Pasteur, ou qu'il s'appelle Vacher. L'individu finira par rester seul avec son moi, à la place de tous les "esprits collectifs", à la place de tous les milieux professionnels qui avaient, à travers le temps, créé des liens de solidarité et maintenu des traditions d'honneur commun. Ce sera le triomphe de l'individualisme atomiste, c'est-à-dire de la force, du nombre et de la ruse. (Alfred Fouillée, La Démocratie politique et sociale en France, 1910)» (p. 75)
«Les grandes proclamations républicaines du retour à la politique dans les années 1990 ont, pour l'essentiel, servi à soutenir les décisions des gouvernements, là même oè elles signaient l'effacement du politique devant les exigences de l'illimitation mondiale du Capital, et à le stigmatiser comme arrièration "populiste" tout combat politique contre cet effacement. Restait alors à mettre, avec ingénuité ou cynisme, l'illimitation de la richesse au compte de l'appétit dévorant des individus démocratiques, et à faire de cette démocratie dévorante la grande catastrophe par laquelle l'humanité se détruit elle-même.» (p. 78)
«Nous pouvons maintenant revenir aux termes de notre problème initial: nous vivons dans des sociétés et des États qui s'appellent des "démocraties" et se distinguent par ce terme des sociétés gouvernées par des États sans loi ou par la loi religieuse. Comment comprendre que, au sein de ses "démocraties", une intelligentsia dominante, dont la situation n'est pas évidemment désesperée et qui n'aspire guère à vivre sous d'autres lois, accuse jour après jour, de tous les malheurs humains un seul mal, appelé démocratie?» (p. 79)
«À bon droit: ce que nous appelons démocratie est un fonctionnment étatique et gouvernamental exactement inverse: élus éternels, cumulant ou alternant fonctions municipales, régionales, législatives ou ministérielles et tenant à la population par le lien essentiel de la représentation des intérêts locaux; représentants du peuple massivement issus d'une école d'administration; ministres ou collaborateurs de ministres recasés dans des entreprises publiques ou semi-publiques; partis financés par la fraude sur les marchés publics; hommes d'affaires investissant des sommes colossales dans la recherche d'un mandat électoral; patrons d'empires médiatiques privés s'emparant à travers leurs fonctions publiques de l'empire des médias publics. En bref: l'accaparement de la chose publique par une solide alliance de l'oligarchie étatique et de l'oligarchie économique. On comprend que les contempteurs de l' "individualisme démocratique" n'aient rien à reprocher à ce systéme de prédation de la chose et du bien publics. Du fait, ces formes de surconsommation des emplois publics ne relèvent pas de la démocratie. Les maux dont souffrent nos "démocraties" sont d'abord les maux liés à l'insatiable appétit des oligarques.» (pp. 80-81)
«Nous ne vivons pas dans des démocraties. Nous ne vivons pas non plus dans des camps, comme l'assurent certains auteurs qui nos voient tout soumis à la loi d'exception du gouvernement biopolitique. Nous vivons dans des états de droit oligarchiques, c'est-à-dire dans des États où le pouvoir de l'oligarchie est limité par la double reconnaissance de la souveraineté populaire et des libertés individuelles. » (p. 81)
«Toutes les bonnes choses ici-bas ont leur revers: la multitude délivrée du souci de gouverner est laissé à ses passions privées et egoïstes. Ou bien les individus qui la composent se désintéressent u bien public et s'abstiennent aux éléctions; ou bien ils les abordent du seul point de vue de leurs intérêts et de leurs caprices de consommateurs. Au nom de leurs intérêts corporatistes immédiats, ils opposent grèves et manifestations aux mesures qui visent à assurer l'avenir des systèmes de retraite; au nom de leurs caprices individuels, ils choisissent aux éléctions tel ou tel candidat qui leur plait, de la même manière qu'ils choisissent entre les multiples sortes de pains que leur offrent les boulangeries branchées. Le résultat en est que les "candidats de protestation" totalisent aux éléctions plus de voix que les "candidats de gouvernement". (p. 83)
«Populisme est le nom commode sous lequel se dissimule la contradiction exarcerbée entre légitimité populaire et légitimité savante, la difficulté du gouvernement de la science à s'accomoder des manifestations de la démocratie et même de la forme mixte du système représentatif. Ce nom masque et révèle en même temps le grand souhait de l'oligarchie: gouverner sans peuple, c'est-à-dire sans division du peuple; gouverner sans politique. Et il permet au gouvernement savant d'exorciser la vieille aporie: comment la science peut-elle gouverner ceux qui ne l'entendent pas?» (p. 88)
«En se déclarant simples gestionnaires des retombées locales de la nécessité historique mondiale, nos gouvernements s'appliquent à expulser le supplément démocratique. En inventant des institutions supra-étatiques qui ne sont pas elles-mêmes des États, qui ne sont comptables devant aucun peuple, ils réalisent la fin immanente à leur pratique même: dépolitise les affaires politiques, les placer en des lieux qui soient des non-lieux, qui ne laissent pas d'espace à l'invention démocratique. Ainsi les États et leurs experts peuvent-ils s'entendre tranquillement entre eux. La "constitution européenne" soumise aux malheurs que l'on sait illustre assez bien cette logique. » (pp. 89-90)
«Toute politique oubliée, le mot démocratie devient alors à la fois l'euphémisme désignant un système de domination qu'on ne veut plus appeler par son nom et le nom du sujet diabolique qui vient à la place de ce nom effacée: un sujet composite où l'individu qui subit ce système de domination et celui qui le dénonce sont amalgamés. C'est avec leurs traits combinés que la polémique dessine le portrait-robot de l'homme démocratique: jeune consommateur imbécile de popcorn, de télé-réalité, de safe sex, de sécurité sociale, de droit à la différence et d'illusions anticapitalistes ou altermondiaistes. Avec lui les dénonciateurs tiennent ce dont ils ont besoin: le coupable absolu d'un mal irrémédiable. Pas un petit coupable mais un grand coupable, qui cause non seulement l'empire du marché dont les dénonciateurs s'accommodent mais la ruine de la civilisation et de l'humanité» (pp. 97-98)
«C'est ainsi que, au moment de l'effondrement du système soviétique, l'extermination des Juifs d'Europe a pris la place de la Révolution sociale comme l'événement coupant l'histoire en deux. Mais pour qu'elle prenne cette place, il fallait en ôter la responsabilité à ses véritables auteurs. Là est en effet le paradoxe: pour qui veut faire de l'extermination des Juifs d'Europe l'événement central de l'histoire moderne, l'idéologie nazie n'est pas une cause adéquate, puisqu'elle est une idéologie reactive, qui s'est opposée à ce qui semblait caractériser alors le mouvement moderne de l'histoire - rationalisme des Lumières, droits de l'homme, démocratie ou socialisme» (p. 99)
«Il est vrai que cette dénonciation de la démocracie comme crime interminable contre l'humanité n'a pas de conséquences bien étendues. Ceux qui rêvent d'un gouvernement restauré des élites à l'ombre d'une transcendance retrouvée s'accomodent au total de l'état de choses existant dans les "démocraties"» (p. 100)
«La nouvelle haine de la démocratie n'est donc, en un sens, qu'une des formes de la confusion qui affecte ce terme. Elle double la confusion consensuelle en faisant du mot "démocratie" un opérateur idéologique qui dépolitise les questions de la vie publique pour en faire des "phénomènes de société", tout en déniant les formes de domination qui structurent la société. Elle masque la domination des oligarchies économiques en assimilant leur empire aux seuls appétits des "individus démocratiques". Elle peut ainsi attribuer sans rire les phénomènes d'accentuation de l'inégalité au triomphe funeste et irréversible de l' "égalité des conditions" et offrir à l'entreprise oligarchique son point d'honneur idéologique: il faut lutter contre la démocratie, parce que la démocratie c'est le totalitarisme.» (p. 101)
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