quarta-feira, 1 de novembro de 2017

OS URINÓIS PÚBLICOS



Pelo seu interesse e originalidade, transcrevemos o artigo hoje publicado no jornal "Libération":


Les pissotières : paradis perdu ?

(mise à jour :


 
 
 
Ecrire un livre nostalgique sur les pissotières ? Marc Martin l’a fait. Dans un ouvrage illustré à la fois de photos érotiques et de documents rares –“Toilettes publiques, histoires privées”–, il dresse l’histoire d’un lieu qui inspira les plus grands écrivains.


Attiré par les fantômes et les fantasmes urbains, le photographe Marc Martin consacre aux pissotières un ouvrage inédit et chargé de mélancolie –Toilettes publiques, histoires privées–, qui ressuscite le souvenir de tout un pan d’histoire. Qui se souvient encore des petits édicules, qui parsemaient le vieux Paris ? «Ces phares urbains, insolites, abritaient discrètement, sans stigmates, tous les désirs du monde.» En préface de l’ouvrage, Joël Hladynink (dirigeant du groupe Gai-pied), rappelle avec lyrisme l’importance qu’ont pu avoir, pour toute une communauté, ces lieux d’aisance aux relents d’ammoniaque. «Les pissotières... Sales ? Infamantes ? Dégradantes ?». Oui et non. C’étaient des «lieux de passage» c’est-à-dire, par essence, des lieux d’initiation et de mystères. On y allait pour «l’attraction du danger», braver les interdits, affronter sa part d’ombre au hasard d’une rencontre. Dès 1913, l’écrivain Paul Lintier (qui va mourir peu après d’un éclat d’obus), écrit dans Les Pissotières magiques ou le rituel de la pluie «que la magie recule presque partout devant les progrès de la technique», mais que les pissotières résistent, même quand on les construit sous la terre, comme des lieux de dévotion où s’accomplissent d’occultes cérémonies.

«Oui, c’était bandant de se mater dans les chiottes»

Pour Marc Martin, c’est là qu’il fait ses classes. «Les pissotières étaient en voie d’extinction quand j’ai commencé à les fréquenter». Il affirme y avoir «découvert beaucoup d’humanité ; beaucoup plus que dans certains lieux actuels dits de rencontre et de convivialité.» Les «imaginaires en marge», les «interstices» l’ont toujours attirés. Mais surtout l’image de lieux voués à l’abandon qui portent en eux la mémoire collective des hommes. De fait, le premier chapitre s’intitule Le Cimetière des pissotières. Il est illustré par les photos noir et blanc de vespasiennes art nouveau mises en pièce, qui gisent dans un terrain vague. Triste vision de fin du monde. Ces vespasiennes aux formes végétales faisaient de Paris la ville la plus folle du début du XXe siècle. Elles avaient été dessinées par l’architecte Gabriel Davioud, en charge de tout le mobilier urbain parisien : colonnes Morris, fontaines, bancs, lampadaires, grilles d’arbre… Leurs formes végétales couleur vert bouteille introduisaient la nature sur les trottoirs. «Fleurissent à Paris ces fameux kiosques-urinoirs de 3 à 16 places selon leurs configurations. On n’en croise pas moins de 4000 sur le pavé au début du siècle dernier!, s’émerveille Marc Martin. Fallait-il s’appeler Freud pour se douter que dans de tels espaces […] les hommes entre eux, côte à côte avec leur sexe à la main, ne se contenteraient pas d’uriner ?»

Chapelle, Tasse, Pagode, Ginette, Pistière…

La ville lumière s’enorgueillit de ses édicules : elles sont appelées Vespasiennes par allusion à l’Empereur Vespasien qui jadis mit en place un système de latrines publiques, par mesure d’hygiène. Dans l’argot populaire on les renomme Tasse, Théière ou Parloir par allusion ironique aux salons de thé : des lieux où l’on cause. On les appelle aussi Ginette, Baie, Gogue ou Pagode. Celles à trois places sont des Chapelles. Celles à deux places des Causeuses. Dans la Recherche, Marcel Proust les nomme Pistière. En 1910, au cours d’un long séjour à Paris, Eugène Wilhelm (1856-1951), qui recopie les graffitis homosexuels dans les pissotières, s’étonne de leur abondance : «Je ne connais aucune ville dans laquelle il y ait autant de pissotières que Paris. Sur les boulevards et les rue principales se dresse un pissoir à 3 stalles toutes les dizaines de mètres. On en compte plusieurs milliers à Paris tandis qu’à Berlin on peut marcher plusieurs kilomètres, notamment dans la Friedrichstraße, sans croiser un seul pissoir.» En effet, Berlin, à ce moment-là, compte à peine 139 édicules pour répondre aux besoins pressants de la population masculine. Hélas… Dans l’après-guerre, la tendance va s’inverser.

Faire la chasse aux pissotières

Alors que Paris «déclare le combat à ses urinoirs», notamment dans les quartiers chics, Berlin, «dans son plan de reconstruction va inonder la ville de nouveaux pissoirs de toutes sortes.» En Allemagne les quelques “Cafés Achteck” ayant résisté aux bombardements, sont désormais classés monuments historiques. En France, et malgré l’hommage appuyé d’Henry Miller (en 1946, dans un texte intitulé Printemps Noir) à ces lieux qui permettent de «pisser librement», les autorités s’émeuvent de ce que ces lieux blessent la morale et la décence publique. Après plus d’un siècle d’exploitation, leur suppression est votée au conseil municipal de Paris, en 1961. En cause : non pas l’odeur, mais les mauvaises fréquentations de l’endroit. Progressivement, les édicules sont détruits. Puis remplacées par des cubes «couleur du temps : gris», ainsi que le souligne si justement Marc Martin, prévues pour un usage strictement individuel, à entretien automatique. On les appelle des sanisettes, un nom aussi laid que leur apparence. Elles sont installées pour la première fois à Paris en novembre 1981 par la société J.C. Decaux. «Persécutées puis assassinées par Decaux et ses sanisettes, les pissotières de la capitale débarrassent définitivement le plancher au milieu des années 80 et s’en vont toutes mourir, à l’abri des regards, en banlieue parisienne.»

Avec les urinoirs, c’est un siècle d’histoire qu’on assassine

Même Edgar Morin s’en émeut. A 92 ans, dans un entretien pour Rue 89, en 2013, le philosophe déplore la perte de convivialité d’une capitale déshumanisée, évoquant l’importance des vespasiennes pour la communauté homosexuelle. En introduction de son livre, Marc Martin répète : «Les lieux sont la mémoire, et bien plus, les lieux survivent à la mémoire.» Mais que se passe-t-il quand on les détruit ? On perd plus qu’un patrimoine. On perd une forme de sociabilité. Marc Martin note avec acuité qu’on trouve régulièrement, «des gerbes de fleur à la Genet au pied des “monuments” arrachés». Tout au long des années 1970-80 qui voient disparaître les édicules, des hommes ressentent comme un vide la perte de ces urinoirs collectifs, remplacés par des toilettes individuelles, insipides et aseptisées qui s’ouvrent automatiquement au bout de 10 minutes afin qu’aucun couple ne puisse s’y désirer. Ginette, reviens ! Avec cette conscience aiguë de la mort qui frappe les humains à travers leurs lieux de rencontre, Marc Martin en appelle à la résurrection des Gogues. Il n’y en a plus qu’une seule à Paris mais, dit-il, l’ultime «survivante, boulevard Arago dans le 14 arrondissement, vespasienne à deux places disjointes […] ne me parle pas. Elle semble perdue ; comme posée là dans un autre temps, au milieu de nulle part, sur un trottoir où personne ne passe […] Elle sonne faux.»

Le dernier des WC d’antan

Cette pauvre vespasienne, située sous les miradors de la prison de la Santé, «condamnée à n’être plus que le souvenir d’un temps qui n’est plus» est parfaitement représentative du sort que Paris réserve aux pissotières. Il est d’ailleurs significatif que Marc Martin n’ait pas pu –malgré plusieurs années de travail acharné– monter aucune exposition sur ce thème à Paris : aucun Musée n’a accepté, même ceux dont les Directeurs se montraient très favorables. C’est donc à Berlin, au Schwules Museum (Musée de l’homosexualité), que l’on pourra bientôt voir une grande rétrospective sur l’histoire des urinoirs, l’occasion de vérifier sur le vif cette vérité : dans une ville qui a gardé ses pissoirs, il y a plus de désirs et d’imaginaire que dans une ville qui sent le chlore. Et si vous ne pouvez pas vous rendre en Allemagne, reste le livre-catalogue pour mesurer l’ampleur de ce qui s’est perdu.



A LIRE : Fenster zum Klo, Toilettes publiques, histoires privées (ouvrage bilingue allemand-français), catalogue d’exposition de 300 pages, couleur, éditions Agua, sortie le 10 novembre 2017. En pré-vente aux Mots à la bouche.

A VOIR : Exposition Fenster zum Klo, Toilettes publiques, histoires privées, au Schwules Museum (Lützowstraße 73, 10785 Berlin), du 17 novembre 2017 au 5 février 2018.

RV le 15 novembre pour la suite de cet article. (Vous voulez du soupeur ?). 


1 comentário:

Zephyrus disse...

Curiosamente em Inglaterra sao comuns as caixas de preservativos em urinois masculinos, ocorrem em aeroportos ou centros comerciais.